"Bac : la lutte inégale contre la triche «high-tech»" (Le Figaro)

Plus d'informations
07 Jui 2012 10:58 #822 par Loys
A lire dans "Le Figaro" du 30/05/12, cet article de Caroline Beyer : "Bac : la lutte inégale contre la triche «high-tech»" .


Quelque chose est masqué pour les invités. Veuillez vous connecter ou vous enregistrer pour le visualiser.

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

Plus d'informations
07 Jui 2012 11:03 #823 par Loys

«Il faut éviter les épreuves de restitution et proposer davantage d'oraux, observe Philippe Tournier.

Directeur du service interacadémique des examens et concours (Siec), qui gère les examens en Ile-de-France, Vincent Goudet invite également à concevoir «des épreuves jugeant davantage le raisonnement».

Car bien sûr le commentaire de texte ou la dissertation sont "des épreuves de restitution" et ne sollicitent en aucun cas "le raisonnement". :evil:

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

Plus d'informations
08 Jui 2012 22:21 #835 par Loucath
Le laxisme et la démagogie sont tels aujourd'hui que le métier de "prof de l'être" a effectivement perdu beaucoup de son sens. Ce que l'on nous demande actuellement de faire et d'accepter est si souvent contraire à nos valeurs... Et ça, ajouté à la fatigue de l'inévitable répétition, des activités obligatoires fondées sur du vent et, surtout, des "incivilités" et de la passivité de certains élèves (pardon : de certains "apprenants"), c'est décourageant...
Les corrections ? Un vomitif radical. Puisque la plupart des élèves refusent l'effort de réflexion et d'analyse personnelles, qu'ils trichent et que tous les corrigés de disserts et commentaires de textes classiques se trouvent à leur disposition en quelques clics, à quoi bon, par exemple, leur proposer encore en temps libre des devoirs d'entraînement de type bac ?

Cette année, plusieurs de mes élèves de 1ère (les perturbateurs ou/et fumistes habituels) ont fraudé à un bac blanc en recopiant plus ou moins un commentaire composé trouvé sur Internet (vivent les smartphones qui se planquent si facilement... ). J'ai imprimé et agrafé les preuves, accablantes, à leurs devoirs, avec pour résultat chiffré la seule note qu'ils pouvaient mériter (coefficientée, bien évidemment) - pour moi ça ne se discutait même pas, que pouvais-je leur attribuer, que pouvaient-ils bien mériter d'autre ?... après quoi j'ai averti mes supérieurs hiérarchiques en leur confiant les copies…
Je pensais naïvement que j'avais signalé et noté comme il se devait les coupables et que pour moi, l'affaire s'arrêterait là...
Eh bien, on n'imagine pas l'addition de toutes les petites tracasseries administratives qui ont suivi... enrobées le plus souvent dans le soyeux, le lisse, le correct mais, en réalité, assez déstabilisantes :

- mise en doute quasi immédiate de ma parole, placée au départ dans la balance avec le même poids que celle des élèves en question - menteurs, dans un premier temps, comme ce n'est ni permis ni imaginable… Quel talent dans la simulation de l'innocence outragée !
- rapide suggestion (que j'ai refusée avec force et qui a été vite abandonnée) de leur pondre un autre sujet et donc de corriger d'autres devoirs - autrement dit de passer l'éponge en y gagnant personnellement un pensum...
- convocation chez le Proviseur : "Il semble que des élèves aient triché" (…) "de fortes probabilités"(…) de lourdes présomptions"... Ces précautions oratoires m'agacent, me vexent et je le lui dis. Il se fâche.
- Reproches au sujet des zéros (on me dit ne pas vouloir "me désavouer" mais voilà, je n'aurais pas dû...)
- Interrogatoire discret, au fil de la conversation, avec demandes de justification de mes modes d'évaluation. Consternant : à se demander si ce n'était pas moi, la fautive...
- Mansuétude, en revanche, pour les fraudeurs qui ne doivent surtout pas avoir de "casier judiciaire" [sic] : défense m'est faite d'écrire les mots "fraude", tricher" ou de faire toute allusion à des malhonnêtetés sur les bulletins trimestriels : pas de traces, surtout pas de vagues...
- Contestation par "Monsieur le Censeur" de mes appréciations - sévères malgré tout - sur lesdits bulletins : j'ai dû les réécrire en termes édulcorés…

Plusieurs fraudeurs ont continué à nier de façon éhontée toute tricherie, malgré les similitudes évidentes, surlignées par mes soins, entre la page d'un site et "leur" prose. L'un m'a même traitée de "parano". J'ai dû rédiger un rapport, ma parole orale ne suffisait pas... Bon ! L'insolent a quand même été sanctionné.

Ensuite ? après tant d'énergie gaspillée, il m'a été conseillé de "gérer" l'incident, d'oublier les "erreurs", de dépasser "la crise de confiance", de "recréer du lien"... comme si c'était facile… :evil:

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

Plus d'informations
08 Jui 2012 22:53 #836 par Loys
Toute ma sympathie, chère collègue. Vous faites partie des Justes.

Toutes ces tracasseries ont un seul but - conscient ou inconscient : faire réfléchir à deux fois la prochaine fois. :|

Je vous renvoie à ma propre expérience au bac : www.laviemoderne.net/grandes-autopsies/7-les-bas-cotes-du-bac

Voilà qui me fait penser, sur le même principe, aux commissions d'appel qui sont une véritable plaie à organiser (rendez-vous parent, photocopies, signatures etc.) et à affronter (éloignement, attente, remise en cause professionnelle dans les commissions les plus laxistes). Il faut un sacré courage pour recommencer l'année suivante, alors qu'il est si simple et si bien vu de laisser passer les élèves.

Je me souviens d'une collègue qui a attendu des heures et des heures. L'élève voulait entrer en seconde générale avec moins de cinq de moyenne : l'appel n'aurait même pas dû être possible. La famille ne s'est même pas présentée. Le dossier n'a même pas été examiné : il manquait une signature, l'élève est passé au bénéfice du doute.

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

Plus d'informations
09 Jui 2012 09:45 #842 par Loucath
Bonjour Loys,

J'avais lu (et fait connaître) votre témoignage accablant sur une des pires défaillances du système... Il va de soi que je souscris à 100% aux analyses que vous exposez dans votre conclusion.

J'ai raconté dans le détail, en salle des profs, ce que j'expose plus haut et une de mes collègues, habituellement très discrète, s'est mise elle aussi à apporter de l'eau au moulin des témoignages de laxisme et de démagogie, ces deux mamelles qui nous empoisonnent tous :
Lors des épreuves orales de l'EAF, écoutant un candidat répondre à la question de lecture analytique, elle a remarqué l'agitation étrange d'une jeune fille, au fond de la salle, pendant ses trente minutes de préparation. Quand elle l'a finalement surprise en train de sortir de son sac des fiches de cours, elle a immédiatement signalé le comportement avant de reprendre le cours de ses interrogations. Pendant sa pause de midi, elle a rédigé un rapport de fraude et n'a plus pensé à l'affaire jusqu'à ce qu'une autre examinatrice, le soir même, ne lui dise incidemment qu'elle avait dû interroger une élève supplémentaire - sans qu'on ne lui en ait donné la raison. Prise d'un doute, ma collègue lui a demandé le nom et le prénom de la candidate, je vous laisse deviner la suite... Il va sans dire que ma collègue, malgré sa pugnacité, n'a jamais eu de nouvelles des suites de son rapport...

Il doit, hélas, exister une pléthore de cas similaires... Depuis au moins deux décennies, je constate dans une impuissance de shadok la victimisation de coupables et la culpabilisation des Justes. Nous vivons dans un monde orwellien que Michéa a clairement exposé dans son essai L'Enseignement de l'ignorance.

Paradoxalement la lecture de ce genre d'ouvrages sur l'école m'aide à prendre de la distance par rapport à des situations insupportables. Brighelli, Polony et d'autres rédigent des synthèses de ce que nous ressentons au quotidien sans avoir toujours le temps de l'extirper, de l'analyser, de le mettre en mots et ça fait du bien. A la réflexion, je me dis que ce n'est pas paradoxal, d'ailleurs. Il y a une vingtaine d'années, un livre de Maschino, Quand les profs craquent, m'avait bien aidée à comprendre ma CIP (traduire : crise d'identité professionnelle qui, dans les cas sévères, peut conduire à la TS...)...

Au sujet des passages au forcing, il y aurait aussi beaucoup à dire... J'ai assisté une seule fois, en tant que professeur principal, à une commission d'appel. Après une assez longue attente, on m'a placée, debout, au centre d'un demi-cercle de personnes à la mine presque menaçante qui, d'emblée, m'ont dit : "Parlez-nous du petit Chose"... Je leur ai répondu : "Vous avez le dossier, les appréciations et les notes, la lettre de motivation de la famille. Gagnons du temps, voulez-vous ? que voulez-vous savoir au juste ?" Cette réponse a manifestement beaucoup déplu, quelqu'un m'a demandé si l'élève était "calme et gentil". Avec une ironie encore très mal perçue, j'ai répondu, grosso modo, qu'il était passif et souvent endormi mais que l'école n'étant pas une garderie, j'attendais qu'on l'évalue essentiellement sur ses qualités scolaires. Tollé quasi général. On a finalement décrété qu'un redoublant qui atteignait 7.5 en maths, en anglais et en français mais s'en sortait tout juste un peu mieux dans d'autres disciplines méritait le passage. Avant de prendre congé de ces tristes sbires, j'ai tenu à dire que si l'on me faisait un jour l'honneur de participer aux arbitrages d'une Commission d'appel, jamais je ne m'opposerais aux avis formulés par des profs qui ont suivi un élève pendant des mois (et en ont parfois souffert)...

J'assisterai prochainement au conseil de classe de mes secondes. Le Proviseur m'ayant rappelé dernièrement que les professeurs n'avaient pas d'autorité pour les passages en 1ère et que la décision finale appartenait au chef d'établissement, je n'y ferai donc pratiquement que de la figuration et refuserai catégoriquement de formuler quelque avis que ce soit...

Bon week-end, bon courage à tous en cette fin d'année scolaire et merci à vous, Loys et à vos amis, pour avoir créé ce site intelligent. ;)

Connexion ou Créer un compte pour participer à la conversation.

Propulsé par Kunena