"Les élites débordées par le numérique" (Le Monde)

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27 Déc 2013 11:29 #8965 par Loys
A lire dans "Le Monde" du 27/12/13 : "Les élites débordées par le numérique" par Laure Belot.

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27 Déc 2013 12:21 #8967 par Loys
Un article bien dans le prolongement de la Petite Poucette de Michel Serres , façon libérale et entrepreneuriale mais avec les mêmes erreurs et les mêmes naïvetés...
Quelques observations par exemple :

Septembre 2013. Un bijoutier niçois tue son agresseur et reçoit, en cinq jours, plus d’un million de soutiens sur Facebook. « Une véritable culture nouvelle, initiée par les “digital natives”, c’est-à-dire la “génération Y”, se répand mondialement, explique Marie Ekeland, vice-présidente de France Digitale, association qui soutient le développement des start-up.

Bien sûr les soutiens au bijoutier niçois sont tous des "digital natives" ! :cheers:

Chez Wikipédia, 5e site le plus visité du monde et symbole de la culture collaborative en ligne, Adrienne Alix, directrice des programmes de Wikimédia, sa structure faîtière...

:shock: :D

...remarque : « Un signe majeur de la déconnexion des élites est l’usage de l’expression “nouvelles technologies”. Ils parlent de “plan numérique” comme si on planifiait la récolte de blé en URSS, cherchant à contrôler des choses qui ne sont pas contrôlables. »

Bel aveu s'agissant de l'encyclopédie collaborative en ligne. :rirej

En France, c’est à leur propre court-circuitage, par le biais de YouTube, Twitter ou Facebook, que syndicats et lobbys traditionnels ont assisté en 2013.

Quels rebelles que ces réseaux commersociaux ! :mrgreen:

La Fédération nationale d’équitation, au bord de la route numérique, a découvert sur Facebook la croisade des éleveurs équins contre l’« équi-taxe ». Même surprise du patronat concernant les colères fiscales des « tondus », « poussins » et « abeilles », inspirées de celle des « pigeons », en novembre 2012, mouvement rejoint tardivement par un Medef dépassé. « C’est le bas qui pousse, estime Jean-Marc Lech. Cette société de liberté déborde toutes les élites, sans aucune culpabilité. »

Ah bon, les "pigeons", ces entrepreneurs contre la réforme de la fiscalité, c'est "le bas" ?
Les "dindons" contre la réforme des rythmes scolaires, autrement plus nombreux et plus représentatifs du "bas", n'ont guère été entendus pour leur part...

« LES CITOYENS RÉINVENTENT LA SOCIÉTÉ À LEUR ÉCHELLE »
Massivement, et mondialement, l’outil Internet engendre de nouvelles pratiques économiques et sociétales. Les internautes tissent des liens horizontaux, achètent et vendent sur Leboncoin.fr, pratiquent le covoiturage grâce à BlaBlaCar, conduisent la voiture de leur voisin au moyen de Ouicar.fr, s’entraident sur Craigslist.org, se logent sur Airbnb.com…

Comme c'est merveilleux ! Un monde plus beau, plus ouvert et plus collaboratif... :santa:

« On pourrait dire que ces usagers court-circuitent les intermédiaires, mais ce terme signifierait qu’ils y mettent une volonté politique. Or ces pratiques ne sont pas clivantes au sens droite-gauche. Issus de tous bords, les citoyens s’emparent d’Internet pour agir différemment et réinventent la société à leur échelle. Sans même le chercher, ils questionnent l’organisation pyramidale gouvernée par les “sachants” », explique Antonin Léonard, cofondateur de la communauté OuiShare.

Vulgaire paraphrase de Michel Serres.

Cette société civique...

Il faudrait peut-être les déluges de tweets antisémites ou homophobes...

...qui s’auto-organise a déjà ses têtes de pont, prêtes à jouer dans la cour mondiale des grands : OuiShare, catalyseur des pratiques collaboratives, a des relais à Rome et Berlin ;

Si c'est OuiShare qui organise, il n'y a plus d'auto-organisation...

... le réseau Sandbox fédère, de San Francisco à Pékin, un millier d’entrepreneurs de moins de 30 ans qui réseautent et s’entraident ;

C'est beau.

...du Brésil aux Philippines, Plus Social Good rassemble ceux qui « cherchent des solutions collaboratives aux problèmes sociaux », explique le polytechnicien Ismaël Le Mouël, fondateur de Helloasso.com, qui a déjà récolté 4 millions d’euros pour 2 000 associations.

Les récoltes de dons, c'est très moderne. :doc:

« LES BANQUES : INTERMÉDIAIRES INÉVITABLES »
Sans centre, sans frontières, ces pratiques déstabilisent.

Surtout qu'elles se situent hors la loi. Mais la loi républicaine, n'est-ce pas une vieille lune ? Les réseaux, c'est plus démocratique que les élections. :doc:
"sans centre" mais avec des serveurs pour la plupart aux États-Unis : voir Twitter ou Wikipédia par exemple.

Et pour cause : « Dans l’histoire, ce sont les puissants qui se sont organisés en réseaux larges, pas vraiment le socle de la société »

Les fondateurs de Twitter ou de Google, formés dans des universités d'élite américaines, seraient donc des milliardaires sans être des "puissants".

...explique l’historienne Marjolaine Boutet. Ainsi de l’essor mondial du financement participatif ou crowdfunding. « La récente étude de la Banque mondiale, évaluant le marché à 10 milliards de dollars [7,3 milliards d’euros] en 2025, a été un électrochoc pour le milieu bancaire français », note Vincent Ricordeau, fondateur du site Kisskissbankbank.com, qui aide à financer clips, films, musique…

C'est quand même dérisoire par rapport aux profits commerciaux générés par Internet.

« Nous sommes désormais approchés par des groupes financiers, mais leurs réactions oscillent entre tentatives de récupération ou d’intimidation. La créativité culturelle est aux mains d’un très petit nombre de gens, les élites. Le monde ne pourra changer que si chacun peut avoir accès à sa propre créativité. »

Au delà de l'affirmation démagogique, curieuse formulation : chacun n'aurait donc pas "accès à sa propre créativité" ? :scratch:

Toujours dans le domaine financier, l’ex-banquier d’affaires de BNP Paribas Charles Egly a créé avec son camarade de HEC Geoffroy Guigou la banque de particuliers à particuliers Prêt d’union… pour donner du sens à son travail.

:santa:

« Nous assistons à une bataille mondiale entre les élites 1.0, prises à rebours par la base et ses idées, et les élites 2.0, qui se positionnent sur cette nouvelle économie et remettent en cause les vieux modèles », estime Jean-Michel Billaut, pionnier de l’Internet en France – élu personnalité de l’année par l’Association pour le commerce et les services en ligne.

Ah... ce n'est donc plus du "bas" qu'il s'agit. :devil:

Signe d’une (tardive) prise de conscience ? Pour remettre à niveau ses têtes pensantes, BNP Paribas démarre un « coaching digital international » pour les « G100 » (ses 100 premiers dirigeants) intitulé « Diffusion des usages digitaux ».

Comme quoi le "débordement" peut se gérer. :twisted:

« PROBLÈME GÉNÉRATIONNEL VIOLENT »
La rapidité des changements numériques a laissé nombre de dirigeants et penseurs sur la touche. « Une partie de notre travail est de rappeler des évidences à des clients qui ne vivent pas avec ceux auxquels ils s’adressent. Les consommateurs sont ultraconnectés. Alors qu’en face ces élites voient Leboncoin.fr comme un épiphénomène et sont dubitatives sur l’essor du crowdfunding », explique Dominique Lévy-Saragossi, directrice générale d’Ipsos France.

Heureusement que ces élites sont des "clients" d'entreprises qui les forment à ces questions. :twisted:

« C’est un problème générationnel violent. La philosophie de certains nouveaux comportements comme le partage de l’information ou l’échange est pour eux contre-intuitive. »

C'est surtout que le "partage de l'information" n'est pas de la pensée.

Des Roms à la burqa, « le débat public est phagocyté par de faux problèmes », estime Dominique Lévy-Saragossi. Comme si ces débats pseudo-nationaux permettaient aux élites de garder la main et d’éviter d’affronter les vrais sujets, notamment cette mutation sociétale.

La théorie du complot ? C'est curieux mais ces pseudo-débats ont pourtant l'air de passionner - à tort ou à raison - les réseaux sociaux. :santa:

« L’agrégation de minorités fabrique une réalité fragmentée qui n’est plus lisible par la recherche de faits majoritaires. La notion de moyenne n’a plus de sens. Ce qui pose problème à une élite française cartésienne. »

Et le principe du vote, dans cette réflexion nébuleuse ?

« ÉLITE PARISIENNE UNIDIMENSIONNELLE »
De fait, le problème n’est pas seulement générationnel mais bel et bien français. Ce qui fait écrire à l’éditorialiste britannique Simon Kuper, le 10 mai, dans le Financial Times : « Les élites françaises n’ont pas été entraînées à réussir dans le monde mais dans le centre de Paris. » Le constitutionnaliste Dominique Rousseau avance une explication : « Le problème en France n’est pas tant la déconnexion des élites que la nature même de l’élite, recroquevillée sur les énarques, que l’on retrouve partout, dans les banques, les assurances, les grands groupes, les cabinets d’avocats, les cabinets ministériels, à l’Elysée, à la direction des partis politiques… Cette élite parisienne unidimensionnelle, qui manque de diversité, manque aussi de capteurs pour saisir la société. Autant l’“énarchie” a été très utile pour construire la nation, autant actuellement, compte tenu de cette révolution numérique, elle devient un obstacle. »

La détestation des élites n'a rien de vraiment nouveau. Il suffit de se pencher sur l'histoire de France pour s'en convaincre.

Pour ce membre du prestigieux Institut universitaire de France, on assiste à un double mouvement. Face à ce nouveau monde, cette élite réagit classiquement : « Elle a été formée à l’idée que la volonté générale ne peut être produite que par elle...

Et le vote ? :shock:

Un double mouvement exacerbé par l’attitude des « élites intermédiaires », poursuit-il. Autrement dit les intellectuels, les médias, les universitaires qui ont l’oreille des puissants. « La grande majorité d’entre eux ne jouent pas leur rôle de passeur pour raconter ce qui arrive. Ces intermédiaires rêvent d’appartenir à l’élite principale et cherchent donc à lui plaire. Ils adoptent les codes et les sujets de prédilection de celle-ci.

:shock:
Finalement penser le monde, c'est simple. :rirej

Bien sûr, il existe des penseurs connectés...

De vrais penseurs, quoi.

Une vision que reprend Jean-Michel Billaut, auteur de l’ouvrage Quand la Fr@nce se réveillera, dont certaines parties sont accessibles en ligne

Le titre avec l'arobase est déjà ringard. :mrgreen:

« Depuis la révolution agricole, il y a dix mille ans, nous sommes organisés de manière pyramidale. Nous avons eu les rois, puis les bourgeois après la révolution industrielle, puis lesgrandes écoles depuis la seconde guerre mondiale. Nous sommes dans une fabrique d’élite intergénérationnelle qui pousse ses dauphins pour pérenniser le passé et le pouvoir. Je viens d’interviewer 2 500 créateurs de start-up. La France 2.0 est très réveillée. Elle a un fonctionnement horizontal. Il n’y a que les élites qui ne le voient pas. »

Les créateurs de start-up viennent tous du "bas" ! :cheers:

Cette déconnexion, en pleine période de crise, a de véritables conséquences économiques. « Le système financier français ne prend plus aucun risque », explique Marie Ekeland, associée du fonds Elaia-Partner

C'est vrai que la prise de risque dans le secteur financier a montré récemment toutes ses vertus.

Une belle pousse qui cache une forêt plus sombre : « Les Français épargnent, mais nous trouvons difficilement de l’argent à investir. Dans le numérique, nous sommes obligés de financer des entreprises qui, au départ, ne génèrent pas de chiffre d’affaires.

Et qui n'en généreront peut-être pas à la fin.
Où est le bel esprit libre et collaboratif ? :mrgreen:

Les critères d’évaluation ont changé et le secteur financier peine à comprendre. Les décisions d’investissement se font toujours sur le passé et à court terme. Au bout du compte, les PME françaises se financent à 92 % par de la dette, alors que ce ratio n’est que de 50 % au Royaume-Uni et de 20 % aux Etats-Unis. Dans les autres pays, les investisseurs leur font confiance. Sommes-nous réellement prêts à voir naître de nouveaux champions ? L’âge moyen des entreprises composant le CAC 40 est de 101 ans. »

Une entreprise qui réussit est donc une entreprise jeune. :doc:

Peut-on changer les choses ? Dominique Boullier, professeur de sociologie à Sciences Po, s’est attelé à cette tâche. Sa mission ? « Ne pas reproduire les mêmes élites », avance-t-il tout de go. Directeur exécutif du programme d’innovation pédagogique Forcast, il teste déjà avec ses élèves de nouvelles méthodes.

Des étudiants en sociologie ? Voilà qui va bouleverser le marché !

« Le numérique n’a été abordé qu’en termes de média et de notoriété. On n’a rien compris de la culture qui est en train de transformer la façon de travailler, de se lier.

Et si le numérique n'était pas ce que Dominique Boullier voudrait qu'il soit ?

La désintermédiation remet en cause les rentes de situation qui sont vues comme des abus, explique-t-il. Il faut apprendre à diffuser les informations, lâcher prise, collaborer, co-créer.

Un programme que les entreprises 2.0 n'ont plus qu'à suivre !

Cela produit un nouveau type de richesse, mais c’est une rupture culturelle : il faut faire confiance à la masse, prendre le risque d’ouvrir les vannes. Le droit de propriété est remis en cause...

A appliquer à Dominique Boullier, donc, ou à toutes ces entreprises si innovantes mais qui déposent brevet sur brevet.

... le principe même de l’autorité remis en question. Tout cela est déstabilisant pour le corps professoral. C’est souvent parce que l’on pense avoir une autorité que l’on n’écoute plus. Il s’agit d’un véritable défi de formation. »

Alors qu'un professeur face un élève n'a aucune "autorité", bien entendu. Merci à Laure Belot. :doc:

« LE VIEUX, LA CRISE PUIS LE NEUF »
« La technologie a toujours été un élément perturbateur, insiste, de son côté, Dominique Rousseau. L’imprimerie a permis a des gens qui n’étaient pas connectés de le devenir.

L'imprimerie s'est mise au service des élites, de ceux qui savaient lire.

Au numérique de jouer son rôle. Dans l’histoire, les séquences sont toujours les mêmes : le vieux, la crise puis le neuf. Le moment est dangereux et passionnant. » Adrienne Alix, qui fut historienne, spécialiste du XVIIIe siècle, avant de travailler à Wikimédia, abonde dans ce sens : « Le climat me fait penser à la période précédant la Révolution française, quand se sont développés des livres clandestins, une façon de court-circuiter le monde de l’édition aux mains des élites. Elles considéraient ces écrits comme de la pornographie.

Tout comme certains ont reproché à Wikiépdia d'héberger des contenus pédopornographiques. :devil:
Au passage quelle partie du trafic mondial sur Internet est-il réservé à la pornographie ?

Mais de ces auteurs sont sortis certains tribuns de la Révolution. »

Et des artisans de la Terreur. Et le premier Empire.

Dominique Rousseau perçoit un changement de cycle. « La démocratie ne peut vivre sans élite. Elle est constituée d’un ensemble de personnages qui ont sur la société un savoir, une connaissance, une compétence. » Mais qui constituera l’élite de demain ? « A la différence du XVIIIe siècle, où Voltaire et Rousseau (fait prisonnier pour l’un, conspué par le système pour l’autre) étaient très connectés et ont produit des thèses qui ont eu un écho dans la société, les livres équivalents sur l’époque actuelle ne sont pas encore sortis.

C'est un peu le problème, en effet. Heureusement qu'il y a Michel Serres ! :lol:

Cela va sûrement passer par les réseaux sociaux, qui vont produire ce qui est invisible aux yeux des élites. De là surgiront les intellectuels qui vont donner des mots au monde qui vient. »

Il suffit de s'en convaincre. :santa:

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19 Jan 2014 19:47 #9259 par Loys
Michel Guillou a trouvé dans cet article une source d'inspiration : "Éducation au numérique : les vrais dangers d’Internet" sur "EducaVox" du 19/01/14.

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21 Jan 2014 11:35 #9271 par Loys
Est-il vraiment besoin de commenter ? La conclusion se suffit à elle-même :

Michel Guillou écrit: Les vrais dangers pour l’Internet seraient de ne pas y croire.

Le numérisme est une croyance. :spider:

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09 Mai 2015 17:36 #13917 par Loys

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