"Ces 900 000 jeunes inactifs découragés de tout" (Le Monde)

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15 Jui 2013 09:13 - 15 Jui 2013 09:14 #6379 par Loys
Dans 'Libération" du 15/06/13 cette interview avec le sociologue Pierre Merle: "«Les décrocheurs ne sont jamais vraiment rentrés dans l’école»" .

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Dernière édition: 15 Jui 2013 09:14 par Loys.

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15 Jui 2013 18:26 - 15 Jui 2013 21:32 #6392 par Loys

«Les décrocheurs ne sont jamais vraiment rentrés dans l’école»

Si tel est le cas, le mot décrocheur est pour le moins malvenu. :transpi:

Alors que les chances d’accéder au bac déclinent pour les élèves issus des milieux les moins favorisés, le sociologue Pierre Merle esquisse des solutions.

Quelles sont les sources d'une pareille affirmation ? Jamais une génération en France n'a autant obtenu le Bac qu'en 2012... :shock:

Pierre Merle, sociologue.«Trois catégories voient aujourd’hui leurs chances d’accéder au bac décliner: les enfants d’employés de service, d’ouvriers non qualifiés et d’inactifs.»

Il va falloir chercher par nous-mêmes...

Hier, Jean-Paul Delahaye, Directeur général de l’enseignement scolaire, qui présentait le bac 2013, l’a placé sous le signe des inégalités persistantes à l’école. Le sociologue Pierre Merle explique l’échec d’un système produisant une cohorte de non-diplômés qui, sans bac et avec tout au plus le brevet, seront condamnés au chômage et à la précarité.

Et tous les élèves qui ont un BEP ou un CAP ? :o
La "cohorte" des non diplômés du Bac est passé de 80% à 22,5% d'une génération en moins d'un demi-siècle...

En quoi l’école française est-elle inégalitaire ?
Elle a une spécificité : 17% des élèves en sortent chaque année sans diplôme. Au-dessus de la moyenne de l’OCDE, la France fait nettement moins bien que le Royaume-Uni (8%), la Finlande (7%) ou le Japon (4%).

Le rapport du HCE ( "Les élèves sans qualification : La France et les pays de l’OCDE" , 2010) indique en France le chiffre de 11,8% de jeunes sortis prématurément (18-24 ans) en baisse en 2008 contre 9,8% en Finlande (en augmentation). Des écarts qui ne montrent pas une société française particulièrement inégalitaire.

En fait, ces jeunes ne sont jamais vraiment rentrés dans l’école. Ils ont souvent redoublé dès le CP, puis au collège, où ils ont commencé à décrocher. Sans diplôme, ils vont traîner ce handicap toute leur vie.

On a vu plus haut des exemples d'élèves qui ne montraient pas une grande détermination à aller jusqu'au bout des formations proposées.

Comment l’expliquer ?
Les enfants des catégories populaires ne disposent pas toujours du «capital culturel», pour citer Pierre Bourdieu, souvent nécessaire pour bénéficier pleinement des enseignements scolaires ; c’est-à-dire que l’école utilise un langage qui ne leur est pas assez accessible.

La vulgate bourdieusienne habituelle, qui rend l'école responsable des inégalités. En réalité, c'est parce qu'on a renoncé - sous l'influence de cette vulgate - à apporter à ces jeunes ce "capital culturel", à commencer par ce qu'il a de plus élémentaire : la langue, qu'on a perpétué des inégalités.

Ils sont aussi plus éloignés de la culture scolaire. Beaucoup, d’origine étrangère, ont une moindre aisance linguistique, ce qui va peser sur les apprentissages.

D'où l'importance d'un immense effort dans les quartiers défavorisés et d'un retour à la mission de l'école primaire.

Les recherches ont aussi montré qu’à 4-5 ans, de grandes différences de connaissances cognitives existent entre enfants de catégories aisées, stimulés sur le plan du langage, et ceux des catégories populaires, qui passent souvent plus de temps devant la télé.

Et qu'il faudrait faire entrer davantage dans les écrans à l'école, si on écoutait nos sages techno-pédagogues.

L’école ne diminue pas ces écarts initiaux, elle les accentue.
Le contexte scolaire est aussi très important. A Clichy-sous-Bois ou à Aulnay, en Seine-Saint-Denis, la proportion de parents non-diplômés atteint 70-80%.

Ce contexte est social, et non scolaire.

Même convaincus de l’importance de l’école...

Ce qui n'est pas toujours les cas malheureusement, comme on peut le constater aux réunions de parents d'élèves où deux ou trois parents se présentent pour une classe...

...ils peuvent difficilement aider leurs enfants. De plus, le taux de scolarisation à 2 ans n’excède pas 5% dans ce département - 13% pour la moyenne nationale -, contre plus de 20% en Bretagne, où la population est plus aisée et où les résultats scolaires sont très bons.

Bien sûr.

Notre école donne moins à ceux qui ont moins.

Tout dépend ce qu'on entend par le moins. En terme de moyens, ce n'est pas forcément le cas. En terme de "capital culturel" c'est effectivement le cas par rapport à avant : il n'y a qu'a voir les progrès des difficultés de lecture ou d'expression écrite, même en fin de secondaire.

C’est donc une école injuste ?
Oui. Autre exemple d’iniquité : les options. Quelque 10% des collèges favorisés proposent en options au moins cinq langues vivantes, contre seulement 0,1% des collèges défavorisés.

Un écart dont l'école n'est pas responsable et dont on peut penser qu'il n'influe pas en tant que sur la scolarité.

Sait-on ce qu’il faut faire ?
Les travaux de Thomas Piketty et Mathieu Valdenaire ont montré qu’en réduisant sensiblement les effectifs par classe dans les établissements très défavorisés, on augmentait les compétences des élèves concernés. Alors que si l’on ajoute un élève par classe dans les établissements favorisés, cela n’a pas d’effet négatif. Cette politique pourrait donc se faire à moyens quasi constants !

Les effectifs par classe sont en général bien inférieurs dans les établissements défavorisés, même si l'écart a tendance à diminuer. Il serait plus important de proposer des établissements à taille humaine, et non des usines avec un personnel sans cesse renouvelé.

Le dispositif «plus de maîtres que de classes» lancé en primaire à la rentrée va-t-il dans le bon sens ?
Des chercheurs ont récemment souligné que l’on ne savait pas exactement ce que le fait d’avoir un maître en plus dans la classe pouvait donner.

En Finlande on n'a pas attendu d'avoir le résultat d'études.

Mieux vaut, selon moi, se concentrer sur une ou deux politiques à l’efficacité prouvée. Dans les établissements très défavorisés, allons vers des classes de 15 élèves au CP , des sixièmes à 20, voire moins. Et relançons la scolarisation dès 2 ans dans les zones en difficulté.

Des effectifs réduits sont souhaitables, surtout dans le primaire, mais l'expérience montre aussi qu'il y a dans le secondaire nécessité d'une dynamique de classe pour conduire les élèves vers les progrès scolaires.

L’éducation prioritaire n’est-elle pas censée apporter plus de justice ?
C’est devenu une grosse machine sclérosée. On devrait supprimer ce label rigide car il fait fuir les parents aisés, et imaginer un autre modèle.

Supprimer un label ne changera pas grand chose. Il y a en revanche certaines choses simples qui permettrait de redresser la barre : choisir des personnels d'encadrement permettant d'instaurer un climat de sérénité scolaire et de travail ; stabiliser les personnels, en garantissant par exemple des emplois du temps intelligents (sur trois jours par semaine par exemple) avec si possible une légère réduction de l'horaire hebdomadaire pendant cinq ou dix ans ; plafonner la taille des établissements défavorisés et leur octroyer beaucoup plus de surveillants. Une réforme de l'autorité à l'école et un retour à des exigences scolaires de bon sens.

Dans les projets de réforme, il est prévu de moduler les moyens alloués aux établissements en fonction de leur recrutement social. On donnerait alors réellement plus à ceux qui ont moins. Il faut maintenant que les actes suivent.

Les moyens sont importants, mais ils ne peuvent pas tout.

Et la pédagogie doit-elle changer ?
Elle devrait être repensée. En France, le système de notation est par exemple très décourageant.

Un bon exemple de la responsabilité de la vulgate bourdieusienne : le système de note est décourageant parce qu'il s'applique à des publics qui subissent, depuis la mise en place des nouvelles pédagogies à l'école, une sorte d'échec scolaire artificiel.

La moitié des notes - de 0 à 9 - sont là pour indiquer que le travail n’est pas bon, alors qu’en Finlande il n’y en a qu’une.

L'absence de nuance est une qualité ? :shock:

Il faudrait d’autres formes d’évaluation pour aboutir à une école qui aide et qui intègre, et non qui classe.

L'évaluation n'est qu'un symptôme, pas une cause. Avec le collège et presque le lycée unique, jamais l'école n'a autant intégré les élèves, mais artificiellement malheureusement.

L’école doit abandonner son obsession de la hiérarchie.

L'école n'est pas obsédée par la hiérarchie : ce seraient plutôt les parents ou les médias comme "Le Monde", qui publient chaque année des classements de lycées les responsables de cette obsession,. C'est une vision bien extérieure au métier.

Quel est l’impact du quartier d’origine ?
La mixité sociale des classes et des établissements favorise l’équité et la réussite scolaire. Les élèves des catégories populaires côtoient ceux issus de classes aisées et moyennes qui vont être moteurs, favoriser les ambitions scolaires et augmenter les attentes des maîtres.

Pour que cette mixité ait lieu, il faut que l'école offre aux parents les garanties d'une sérénité scolaire pour leurs enfants. Il faut également éviter la concentration des difficultés scolaires dans les établissements défavorisés : gros effectifs, segpa, classe non francophone, UPI etc.

Mais lorsque la ségrégation sociale et spatiale est forte, la ségrégation scolaire l’est encore plus. Pour la réduire, il faut cesser de différencier les établissements...

Et comment fait-on ? :shock:

...et unifier les offres pédagogiques. Sinon, les parents aisés demandent des collèges avec de l’allemand, des classes bi-langues ou européennes…

Je ne crois pas qu'une telle "unification des offres pédagogiques" soit de nature à changer quoi que ce soit.

Le secteur privé, qui n’est pas soumis à des règles de mixité...

Doux euphémisme. :mrgreen:

...pose aussi problème et ne peut rester à l’écart d’une réflexion sur les valeurs, l’efficacité et l’équité de l’école.

Qu'est-ce à dire, concrètement ? :scratch:
Dernière édition: 15 Jui 2013 21:32 par Loys.

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17 Jui 2013 19:04 #6404 par Loys
Au sujet du Bac de philosophie aujourd'hui (série S) : Le travail permet-il de prendre conscience de soi ?

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17 Jui 2013 19:09 #6406 par Loys
Et dans "Rue89" du 17/06/13 : "Cinq pistes pour se raccrocher à l’école sans y retourner" .

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17 Jui 2013 19:23 - 17 Jui 2013 19:24 #6407 par Shane_Fenton

Madgyd, 25 ans, dealer de shit pour 1 700 euros par mois

C'est plus que ce que je gagnais (net d'impôts) quand je suis rentré dans la vie active.
Pour information :
- Salaire net perçu pendant mes 3 ans de thèse : 1070€
- Salaire net perçu pendant ma première année d'ATER (mi-temps) : 1160€
- Salaire net perçu pendant ma deuxième année d'ATER (plein temps) : 1600€
- Salaire net perçu pendant ma première année d'enseignant-chercheur à l'EISTI : 1750€ (ah, enfin quelque chose qui rapporte plus que dealer)
- Salaire net perçu après ma titularisation et la confirmation de mon CDI : 1900€
On peut rajouter 50€ de plus, puisque les transports en région parisienne me sont remboursés à 50%.
Et comparé aux pauvres 1300€ de ma belle-soeur qui travaille dans l'immobilier, ainsi qu'aux 1600-1700€ de mon frère qui est directeur de l'école de guitare qu'il a fondée, je ne pense pas à me plaindre. Tant pis si mon grand-père est suffoqué que mon salaire soit moitié moindre que sa retraite militaire.
Dernière édition: 17 Jui 2013 19:24 par Shane_Fenton.

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17 Jui 2013 21:08 - 17 Jui 2013 21:08 #6410 par Loys
Je n'ai qu'une chose à dire : votre plan de carrière est nul. :transpi:

On peut rajouter 50€ de plus, puisque les transports en région parisienne me sont remboursés à 50%.

Vous majorez pour ne pas passer pour un minable mais ces 50€ qu'on vous rembourse, vous les avez avancés. :xx:
Dernière édition: 17 Jui 2013 21:08 par Loys.

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18 Jui 2013 11:05 #6422 par Shane_Fenton
Ah, et j'allais oublier : mes chances d'être augmentées sont quasi-nulles : on est en période de crise, l'école est déficitaire, et notre directeur général est un ancien marchand de tapis (quand il a cofondé l'école, il gérait sa boutique, "Izmir tapis", en parallèle).
Et je tourne à 450 heures d'enseignement par an, ce qui est mieux que mes collègues de langues et de Relations Humaines (qui regroupent le français, la philosophie, la communication inter-culturelle...), qui doivent faire 500 heures. Là-dedans, je n'inclus pas les heures supplémentaires non payées, ni (faut pas pousser non plus) les heures à corriger les copies, préparer les cours et les examens, encadrer des projets de type TPE, s'occuper des élèves en difficulté administrative, etc...
Franchement, ça vous fait pas envie, une barrette ou deux ?... :transpi:

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18 Jui 2013 12:23 - 18 Jui 2013 12:24 #6423 par Wikibuster
Que diable allait-il faire dans cette galère ? :scratch:
Dernière édition: 18 Jui 2013 12:24 par Wikibuster.

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19 Jui 2013 14:25 #6437 par Shane_Fenton

Wikibuster écrit: Que diable allait-il faire dans cette galère ? :scratch:

Ah ! maudite galère ! traître de Turc à tous les diables !... Vous ai-je dit qu'en plus d'être un ancien marchand de tapis, le directeur général fondateur de notre école est d'origine turque ? :mrgreen:

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20 Jui 2013 22:49 - 20 Jui 2013 22:49 #6487 par Loys
Petite mise en perspective dans "Le Monde" : "Quand on est caissière avec un bac +5, on apprend l'humilité !" (20/06/13)

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Dernière édition: 20 Jui 2013 22:49 par Loys.

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