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L'anti-"déclinisme" : Chroniques d'hier et d'aujourd'hui
- Loys
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Mesdames et messieurs les journaliste et chroniqueurs, quelles sont les motivations de votre déclinisme exacerbé vis-à-vis de l’École ?
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Voir aussi :Laurence De Cock et Grégory Chambat écrit: En cette rentrée, le débat sur l'éducation est plus que jamais enkysté par les appels au retour à l'ordre moral, à l'autorité et à « l'identité nationale ». Mesures simplistes (port de l'uniforme ou salut au drapeau) et offensives idéologiques (sur le « roman national » ou contre l'enseignement des questions de genre) sont relayées en « une » des magazines ou dans des pamphlets hargneux livrant les prétendus « pédagogistes » à la vindicte populaire.
Sous des aspects plus ou moins folkloriques, c'est la nostalgie d'une école de la ségrégation sociale, du chacun à sa place et de l'entre-soi qui avance masquée. Car ces discours sur le « bon vieux temps » participent d'une offensive réactionnaire qui vise en réalité l'égalité et la démocratie, à l'école et au-delà.
La perspective de la présidentielle alimente cette course à la surenchère « décliniste ». La présidente du Front national (FN), Marine Le Pen, ne s'y est pas trompée, consacrant sa première « convention présidentielle » à la question scolaire pour « capitaliser » sur les discours « antipédagogistes » et tenir sa revanche sur « l'esprit de 68 ».
Depuis trente ans, les déplorations sur le naufrage de l'école, annonciateur de l'effondrement de la « civilisation », sont à la fois le socle de la stratégie de reconquête de l'hégémonie culturelle par les droites extrêmes et l'assise idéologique d'un courant national-républicain.
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A propos du collège unique :
Christophe Chartreux se serait-il converti au déclinisme ?Fausse en effet car cette école-là, celle qui est née presque par effraction à la fin des années Pompidou, n'avait plus de refuge que le nom. Elle devenait celle de la compétition et des inégalités, non pas créées, mais reproduites. Peu à peu, et c'est tragique, l'écart entre les meilleurs et les plus "faibles" allait s'accroître. Peu à peu et chaque année un peu plus. Toujours en défaveur des mêmes.
Mais de quels pédagogues ? De M. Brighelli ?Et la crise a poursuivi son œuvre. Chacun s'accommodant de la situation. Oui l'école devenait inégalitaire. Et alors? L'école reproduisait tout compte fait les inégalités acceptées au dehors. Pourquoi s'inquiéter plus que de raison?
Tout cela malgré beaucoup de signaux d'alerte de la part des pédagogues. Signaux réguliers et plus ou moins espacés dans le temps, sans jamais - et c'est un fait historique - de grands mouvements populaires exigeant la fin d'une école fondée sur l'acceptation scandaleuse des inégalités.
Ce fil de discussion montre plutôt la poisseuse pesanteur du déni pendant des années (et qu'on rencontre encore jusqu'aujourd'hui). D'ailleurs, encore tout récemment sur l'ancien site (opportunément disparu) de M. Chartreux, le 15 juin 2016 :
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Depuis des années, depuis Platon et Socrate (si si !), on affirme que le niveau baisse. Leitmotiv ridicule puisqu'à l'entendre, nous devrions toutes et tous être en train de nous exprimer par signes! Et encore !... Ce discours tient encore et toujours lieu d'argument alors que chacun le sait: toutes les généralités sont vides de sens.
C'est pourtant ce qu'a fait M. Baudelot, cité par M. Chartreux, dans Le Niveau monte en 1989.Aucun pédagogue n'a jamais osé dire que le niveau augmentait. Ce serait tout aussi vide de sens.
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Son blog : lapenseebuissonniere.com/
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L'anti-déclinisme iconoclaste est bien vendeur également. D'emblée, l'article mélange tous les sujets (violence, niveau scolaire, niveau orthographique, politesse), ce qui augure d'une pensée très rigoureuse.Les enfants seraient plus violents, moins bons à l'école, en orthographe, moins respectueux des aînés...
Regretter le passé est un leitmotiv de notre temps, un sujet de prédilection des repas de famille, la garantie de voir liker substantiellement son statut facebook, un sujet inépuisable qui, depuis la reconnaissance du réchauffement climatique, se marie même admirablement bien avec cet autre thème universel qu'est la météo.
Constater une baisse objective des compétences en français, par exemple, c'est donc "prophétiser l'apocalypse civilisationnelle". Nier cette baisse relève surtout d'une curieuse cécité.Aussi paradoxal soit-il dans une société qui loue le progrès, ne jure que par les «réformes» et place nombre de ses espoirs dans la science, il n'en est pas moins omniprésent, dans les médias et le discours public, surtout lorsqu'il s'agit de prophétiser l'apocalypse civilisationnelle que la décadence des mœurs enfantines est censée annoncer.
La réfutation sera donc… psychologique et physiologique. Peu importe les faits objectifs que l'on peut constater : c'est notre cerveau qui nous trompe !La mémoire farceuse
Ce n'est pas un scoop, mais c'est toujours utile de le rappeler: notre cerveau ne fonctionne pas comme une caméra qui enregistrerait des informations qu'on pourrait visionner et revisionner à loisir. Dans son livre Mon cerveau, ce héros, paru en 2015, la chercheuse en sciences cognitives Elena Pasquinelli rappelait à quel point nos souvenirs pouvaient se montrer trompeurs, et ce même lorsque nous ressentions à leur égard une forte confiance.
Reformulation savante et policée du concept de "vieux cons".Un résultat loin d'être anodin puisqu'il remet par exemple en cause le crédit qu'on apporte généralement dans le cadre judiciaire aux «témoins oculaires». En réalité, selon la formulation des questions posées par les enquêteurs, certains témoins peuvent être amené à fabriquer des «faux souvenirs». L'explication en est simple:
«lorsque nous ramenons nos souvenirs à la vie [nous déterrons] des détails qui sont fidèles à notre expérience, mais qui ne sont pas placés dans la bonne "tranche temporelle" […] Le fait est que les souvenirs ressemblent beaucoup moins à des copies fidèles de la réalité qu'à des pages Wikipédia, dans lesquelles chacun de nous peut réécrire des morceaux.»
Avec l'âge, nous retenons plus facilement les stimuli (événements, visages, informations) positifs que négatifs, ce qui pourrait expliquer physiologiquement notre tendance à dire que «c'était mieux avant».
Lorsque nous vieillissons, d'autres phénomènes s'ajoutent et influent sur notre mémoire. La théorie de la sélectivité socio-émotionnelle montre par exemple qu'avec l'âge, nous retenons plus facilement les stimuli (événements, visages, informations) positifs que négatifs, ce qui pourrait expliquer physiologiquement notre tendance à dire que «c'était mieux avant».
C'est bête du coup !Une des explications avancées serait qu'en vieillissant, la perspective de notre finitude nous pousserait à nous concentrer davantage sur notre bien-être et sur la régulation de nos émotions, et donc de prioriser le positif (voir ici ou ici). Pourtant, il semble que cette reconstruction optimiste du passé ne nous aide en définitive pas vraiment à positiver le présent, car nous serions confronté au quotidien à une réalité moins idyllique que nos souvenirs.
Le mieux pour l'hygiène mental, c'est d'étudier les faits de la façon la plus objective possible et d'éviter par exemple la physiologie de comptoir.Il en irait donc de notre hygiène mentale de déconstruire cela!
Nous ne répondrons qu'à ce qui relève du domaine scolaire.
Pendant des années on a surtout entendu la rhétorique du "Niveau [qui] monte"...L'échec scolaire ne cesse de gagner du terrain!
Voilà encore une lamentation récurrente des adeptes du «c'était mieux avant» et qui a même poussé l'Institut Montaigne, un think tank proche de Nicolas Sarkozy, à vouloir faire déclarer en 2011 l'échec scolaire «grande cause nationale».
Et de fait il monte : records d'une génération au bac, explosion des mentions, taux de retard et de décrochage à leur plus bas niveau. Reste à savoir ce qu'il faut penser de ce progrès extraordinaire.
PISA n'est malheureusement pas le meilleur indicateur pour comparer le niveau, d'abord parce qu'il s'agit d'une enquête récente (depuis 2000), qu'elle ne porte que sur trois domaines spécifiques (pas les compétences d'écriture par exemple) et ne mesure que des compétences de base à quinze ans.Derrière cette lamentation, il y a pourtant une réalité qui fait honte, et qui a été rendue particulièrement visible par le programme PISA d'évaluation des systèmes éducatifs dépendant de l'OCDE: entre 2003 et 2013, la tranche d'élève français les moins performants a vu ses performances chuter de manière notable, tandis que la proportion globale d'élèves en difficultés s'est accrue. Pire encore, les inégalités éducatives ont beaucoup progressé, surtout entre 2003 et 2006.
Mais peu importe : il y aurait donc "une réalité" qui justifie cette "lamentation" (sic).
Difficile de suivre la pensée de Mme Kammerer ici. Quel rapport avec l'évolution du niveau scolaire ?Sont particulièrement touchées les catégories socio-professionnelles modestes mais aussi les enfants issus de l'immigration qui sont au moins deux fois plus susceptibles de compter parmi les élèves en difficulté et ce, même en corrigeant les données pour tenir compte des disparités économiques. En 2014, le sociologue Stanislas Morel s'est penché sur l'évolution des causes attribuées depuis les années 1960 à l'échec scolaire. Selon lui, les années 1990 ont constitué un virage au cours duquel on a cessé en France de considérer que les causes de l'échec scolaire étaient sociales (et donc dû au fait que l'école favorisait la culture des catégories aisées) pour envisager l'idée que ces causes étaient d'abord individuelles et devait être résolues médicalement par le diagnostic et la prise en charge de handicaps cognitifs tels que l'hyperactivité ou les troubles «dys». Une perspective sans aucune doute salutaire pour les familles concernées par ces troubles mais qui n'explique pas les fortes disparités sociales et culturelles que souligne l'évaluation PISA.
Beaucoup de raccourcis et de confusions ici : dès après la guerre, le secondaire a connu une "explosion scolaire". Le collège unique n'a fait qu'unifier des voies qui existaient déjà (et étaient déjà réunies sous le nom de CES depuis 1963 avec quatre sections)...Or pour Stanislas Morel, une partie de la réponse se trouve dans l'histoire de l'échec scolaire en France. Au début du XXème siècle, le système scolaire français était divisé en deux parcours parallèles, distincts selon l'origine sociale des élèves: les enfants des catégories populaires fréquentaient l'«école primaire» et terminaient leur scolarité avec l'obtention du certificat d'études tandis que les enfants issus des classes moyennes et supérieures intégraient à six ans les «petites classes» des lycées et y effectuaient leur scolarité de la onzième à la septième avant de poursuivre jusqu'au baccalauréat. Ce n'est qu'en 1975 que cet apartheid social a été totalement aboli au profit du «collège unique» que nous connaissons aujourd'hui.
C'est loin d'être exact : le latin par exemple, caractéristique de la section classique, est devenu une simple option. Ce qui a posé problème, c'est que le collège unique s'est accompagné de moyens dégradés pour encadrer les élèves.Une réforme démocratique et juste, mais qui a révélé les inégalités bien plus qu'elle ne les a résolues puisque c'est l'enseignement bourgeois qui est devenu la norme pour tout-e-s.
Une explication psychologique primaire, donc (la même qu'on retrouve justement dans Le Niveau monte en 1989), et qui curieusement laisse entendre que la baisse a bien eu lieu.C'est donc à cette époque que les professeurs du secondaire, non préparés à l'arrivée de ces «nouveaux publics» ont commencé à crier à la baisse du niveau et que le système éducatif français a commencé sa bataille contre «l'échec scolaire» dès lors révélé.
Au demeurant cette explication est fondée sur un postulat ridicule : les professeurs du secondaire accompagnaient déjà ces "nouveaux publics" dans les collèges d'enseignement général (CEG) depuis 1959 intégrés dans les CES en 1963...
Enfin, la baisse se constate très objectivement (étude 1987-2007 de la DEPP) sur une période plus récente qui n'a rien à voir avec le collège unique...
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Une formule qui évite soigneusement le mot "baisse". Avoir prôné et prôner encore l'aveuglement n'empêche visiblement pas de revendiquer la lucidité avant tout le monde.Lucien Marbœuf écrit: Nota : on lira avec intérêt le post de blog de Claude Lelièvre, qui rappelle opportunément que le niveau en maths des petits français est préoccupant depuis plus de 20 ans, dans l’indifférence générale.
Il est amusant de relire ce billet du même Lucien Marbœuf du 27/10/13, en écho à celui de Jean-Louis Auduc en 2011 . Extraits :
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Ou encore celui-ci du 1/10/2011 : "Le niveau baisse, ma p’tite dame !"
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